C’est quoi se sentir chez soi ?
Depuis plusieurs années, je me questionne sur le sentiment d’être chez soi et le concept de la Maison. Je le recherche sans avoir l’impression de le trouver. Est-ce que je suis à la maison dans les endroits où je déambule sans jamais avoir besoin d’un quelconque plan car la carte s’est imprégnée jusque dans mon être ? Est-ce là où se trouvent la majorité de mes affaires ? Est-ce là où j’ai envie de poser mes valises pour plusieurs années ? Est-ce là où j’ai des centaines de souvenirs qui parsèment les rues ? Est-ce l’endroit où j’ai passé le plus de temps dans ma vie ? Qu’est-ce qui définit la Maison ? Est-ce définit par la sensation de bien-être qui m’envahit quand j’arrive à un endroit précis ?
Paris ? Nantes ? Ailleurs ?
Pourquoi est-ce que le seul endroit où je me sens pleinement à la maison est un endroit où je n’ai pas vécu ? Où je n’ai pas d’amis ? Aucun bâtiment faisant office de port d’attache.
Pourquoi est-ce que Paris ne me donne plus l’impression d’être chez moi malgré les souvenirs, mes amis et le toit sur ma tête ? D’autant plus que je suis dans un quartier que je connais comme ma poche où l’histoire familiale est présente à chaque coin de rue.
Pourquoi est-ce que Nantes n’est pas exactement ma maison non plus ? Malgré l’attachement que j’ai pour cette ville où j’ai doucement grandi pendant plus d’une décennie. Je la vois enfin avec l’oeil neuf du touriste et pourtant il suffit d’un weekend pluvieux pour me rappeler la longueur des hivers tellement humides que j’abandonne toute perspective d’avoir les cheveux domestiqués. Même le vent me semble différent de celui de Paris. Pourquoi ?
Mes racines sont là, éparpillées mais elles ne m’apportent pas le réconfort que j’en attends.
Où est mon Heimat ?
Je me doute que si l’on est bien dans sa tête, on se trouve bien n’importe où mais cela m’interroge sur deux points: le premier voudrait dire que je peux être entièrement et pleinement épanouie ici sauf que je ne le suis pas. J’ai bien conscience que j’ai sûrement bâti une résistance sur ce point. J’ai envie d’aller voir ailleurs, et cela m’obsède. Je me dis, Sibylle cela fait déjà plusieurs années que tu souhaites partir, et tu es toujours là, empêtrée dans le filet parisien ». Je m’en fais une montagne.
Le deuxième point est le suivant: est-ce que mes envies de retourner près de l’océan, de changer de paysage, d’avoir un extérieur ne sont pas valides ? Sont-elles simplement des illusions données par mon cerveau ? Pourquoi est-ce que tout ce que je souhaite serait nécessairement superficiel ? Certains ont envie de changer de vie et d’avoir des enfants en dehors de Paris, personne ne les questionne. Leur choix semble compréhensible pour tout le monde. Pourquoi est-ce que je me sens tant illégitime de vouloir des choses ? Pourquoi est-ce que je remets constamment en question chacune de mes envies profondes ?
Ces questions nous emmènent à la plus importante de toute: Pourquoi est-ce que je ne fais pas confiance à ma petite voix ? Où est-ce que ça bloque ?
Ma première maison reste mon corps, la coquille que je trimballe avec moi nuit et jour. Je dois peut-être apprendre à l’habiter avant tout, au lieu de la squatter comme si on allait me l’enlever incessamment sous peu.
Je laisse ces interrogations en suspend.
A très vite,
Sibylle